samedi 29 janvier 2011

La découverte de la psychologie : attentes et déceptions

Cela n'a de secret pour personne, on ne commence pas des études de psychologie par hasard, et encore moins quand on continue dans cette voie. L'humanisme c'est bien, l'altruisme aussi, la sollicitude encore mieux, mais pour la plupart d'entre nous la psychologie devait surtout, a priori, nous aider personnellement. Elle devait être en capacité de répondre à certaines questions intimes, enfouies, peu définies. Si l'on m'apprend comment comprendre l'autre, peut-être pourrais-je ainsi me comprendre. 
Tout début de cursus s'accompagne d'attentes, voici les miennes il y a plus de six ans.

A moins de connaître de plus ou moins loin le monde psy, il est difficile de savoir de quoi il s'agit vraiment. A mon entrée en première année, le psychologue était pour moi un spécialiste à l'égal du médecin, du biologiste, de l'ophtalmologiste, etc. En somme, un puits de savoir qui applique le remède adéquat aux différents maux des gens, de façon précise et éclairée. Cinq ans ce sera long, et j'aurais le temps d'apprendre un maximum de choses pour enfin aider et soigner ceux qui souffrent.

Mais la psychologie a cette particularité déconcertante de n'apporter aucune réponse si ce n'est que des concepts qui se contredisent les uns les autres et qui se basent sur des axiomes tous discutables. Aucune vérité donc mais l'apologie du doute et du questionnement. La psychologie n'est pas une science au même titre que les autres métiers précités, c'est une science de l'homme, une science de la réalité des êtres plus que de la réalité des choses. Exemple : parlons de l'inconscient. Monsieur tout le monde sait à peu près ce que c'est, il en parle librement : "c'est inconscient", mais il ne se doute pas que le concept d'inconscient fait débat depuis des dizaines d'années entre les psychologues. Car il n'y a pas une mais des psychologies, l'inconscient n'aura pas la même valeur d'un professionnel à un autre. Soit il est psychodynamiste et se basera sur les phénomènes inconscients pour comprendre le psychisme humain, soit il est cognitiviste et aura une toute autre conception de l'inconscient, soit il est comportementaliste et le niera tout bonnement au profit d'autres concepts pertinents, etc. 
La première année présente toutes les différentes disciplines de la psychologie, parfois au sens d'une initiation et effectuée par des enseignants-chercheurs qui prêchent pour leur chapelle. Certains d'entre eux sont tellement convaincu du bien-fondé de leurs théories qu'ils n'hésitent pas à faire croire aux étudiants qu'elles ont valeur de vérité : cela pourra rassurer l'étudiant curieux et avide de belles réponses, mais malheureusement la vérité en psychologie est une totale ineptie ! 
En référence à son code de déontologie, le psychologue a le choix de ses outils, comprenez de ses théories. Comme la psychologie se base sur des théories contradictoires, le psychologue est constamment confronté au doute et à la remise en question de ce qu'il sait ou croit savoir. (un peu de philo : on a toujours le droit de croire, à condition que l'on évite l'illusion de croire que l'on sait ; c'est à dire que l'on sache que l'on croit)
Donc en résumé, point de vérité universelle dans ce monde psychique mais des modèles de pensée tout discutables et extrêmement discutés.

Autre point : la précarité de la profession. La plupart des psychologues d'aujourd'hui doivent faire avec des temps partiels : mi-temps, quart-temps, voire 20%, 10%, etc. ! Selon les conventions et le secteur d'emploi, les psys sont souvent mal payés et leurs postes menacés de suppression. Pourtant, on pourrait penser que ce monde fou ait toujours besoin de plus de psychologues ? Eh bien ça ne se ressent pas de notre côté. Le chômage est une réalité des nouveaux diplômés et la sélection est de plus en plus dure dans les mondes professionnel et universitaire.

Il est inutile d'alourdir le tableau d'éléments négatifs supplémentaires mais ce sont je pense des choses dont il faut prendre conscience très tôt, avant même de commencer ses études. La moitié des étudiants inscrits en L1 quittera le circuit à la fin de l'année ou dès le premier semestre.

Les principaux écueils de la formation

Chaque année, vous êtes des centaines voire des milliers par faculté à vous lancer dans un cursus LMD de Psychologie. Près d'un étudiant sur deux échoue en première année. Seulement moins d'une centaine d'étudiants pourra passer l'ultime sélection pour accéder à la dernière année. Donc, moins de 10% de réussite... ce qui est très peu mais n'est pas inaccessible. Si vous avez la motivation en fer de lance, c'est un bon début.
Je vais tenter de présenter de façon très synthétique les obstacles classiques en formation psycho (mais que l'université aime à garder secret). Les pages arriveront petit à petit.

Étape 1 : La découverte de la psychologie : attentes et déceptions
Étape 2 : Réussir ses examens
Étape 3 : Garder la motivation
Étape 4 : Trouver des stages
Étape 5 : Le Jury de M2 : les enjeux du Mémoire de M1
Étape 6 : Accéder au Master 2
Étape finale : Devenir psychologue et le rester

Posez vos questions

Cela peut prendre la forme de conseils techniques ou d'orientation, d'aide aux révisions de partiel ou par rapport à des expériences de terrain. N'hésitez pas à poser vos questions, nous essaierons d'y répondre.

L'aller-retour théorico-clinique

Cet article s'adresse particulièrement aux étudiants de L1 à M1

En Master 1, un stage de terrain est généralement imposé aux étudiants. En psychologie clinique notamment, il doit se dérouler dans une institution avec un psychologue référent. Le premier stage s'avère souvent difficile pour ceux et celles qui ont été bercés jusqu'alors par trois années d'amphi aux lumières tamisées : de la théorie à la pratique il n'y a qu'un pas ? Mmmh pas si sûr !
La psychologie a cette particularité que son objet d'étude, l'être humain, n'est jamais totalement prévisible. Il peut même mettre en cause les certitudes du chercheur et encore plus celles du tout frais stagiaire. En tant que psychologue, nous sommes souvent déstabilisés par nos patients/sujets qui nous plongent dans le doute ou la sidération. Malgré nos années de formation, nos milliers de pages de cours écrites à la force du poignet, nous sommes parfois, voire souvent, en incapacité de comprendre ce qui se passe devant nos yeux, ni la façon dont nous réagissons ou devrions réagir face à cela.
C'est à ce moment que l'aller-retour théorico-clinique prend son sens : gardons notre questionnement dans un coin de notre tête et replongeons notre nez dans une bibliothèque. Trouvons le thème correspondant à la situation problématique que nous venons de vivre et interrogeons la théorie. Au fil de nos lectures sur le sujet, il nous sera possible de prendre un recul suffisant sur ce que l'on a vécu, d'y mettre des mots, d'y mettre un sens, voire un concept / une théorie. La prise de recul est tout aussi essentielle dans notre métier que notre capacité d'empathie. 
Armés d'une nouvelle compréhension de la situation problématique, nous pouvons maintenant repartir sur le terrain et poursuivre notre travail. Pratique, théorie, pratique, théorie, c'est l'aller-retour qui fonde l'accès à de nouveaux savoirs, mieux, à de nouvelles connaissances, c'est-à-dire des savoirs vécus personnellement. 

Ce sachant, l'on peut différencier deux types d'étudiant en psychologie clinique (cela peut comprendre d'autres disciplines de la psycho) : celui sans expérience de stage dans ses bagages qui a emmagasiné des kilos de savoir et se prépare à les appliquer sur le terrain comme un médicament intellectuel ; et celui confronté au terrain qui est conscient que son savoir n'a d'importance qu'à partir du moment où il a été vécu et a pris du sens au contact de l'autre. Cette remarque peut paraitre bien jolie et légère, pourtant nombre d'entre vous ont déjà pu entendre :
" On ne devient pas psychologue une fois le diplôme en poche, on commence à apprendre le métier une fois en fonction "
C'est pourquoi je conseillerais à tout étudiant de commercer ses expériences de stage au plus tôt. Dès qu'il lui est possible, c'est à dire dès maintenant : L1, L2, ... 
Je suis conscient que ce n'est pas du tout dans l'air du temps en Licence, période où l'on attend seulement que vous réussissiez vos partiels et glaniez au mieux des mentions pour être tranquilles. Si vous ne faites pas de stage en Licence, vous serez comme moi et la majorité des étudiants mis au pied du mur lors de vos candidatures prochaines et déterminantes pour accéder au titre de psy : candidatures de stage M1 / M2 et surtout entretiens de sélection pour accéder au Master 2 (60 à 90% de recalés chaque année !!!).
Aussi il est très difficile de trouver un stage en Master 1 en raison de l'afflux considérable de demandes (c'est l'année du premier stage obligatoire, l'année de la compétition), donc mieux vaut prévenir le problème et gonfler son CV pour se placer en tête des candidats.

samedi 22 janvier 2011

"T'as lu combien de bouquins toi ?"

Particulièrement dans le parcours Licence, les enseignants ont pris l'habitude de donner à leurs étudiants une liste d'ouvrages en lien avec le sujet de leur cours. Elle doit permettre à l'étudiant d'aller plus loin que ce dernier, qui n'est finalement qu'une retranscription ultra-synthétique du contenu de tout ce qu'a pu lire l'enseignant. Retranscription, car pour un même livre on peut en faire plusieurs lectures et différentes compréhensions.
La bibliographie peut parfois être tant intéressante que conséquente, à tel point que cela peut décourager d'emblée l'étudiant qui a déjà du mal à travailler ses cours en termes de motivation, d'organisation, de disponibilité, etc.

Alors que j'étais en première année, mes premières questions devant les énormes listes étaient du genre : Il faut lire tout ça ? C'est vraiment indispensable de lire des bouquins alors que les cours sont déjà bien longs et détaillés ? Quels livres je devrais lire en priorité ? Arrive-t-il que les partiels portent sur le contenu de bouquins ? Faut-il en acheter certains ? etc.
Bref, la plupart des réponses des enseignants étaient, en gros, "faites le maximum que vous pouvez". Mais bien sûr Monsieur ! Je pense que c'est le premier élément de la pression implicite du parcours psycho, dont je parlerai plus tard et plus en détail.

Comment l'étudiant peut réagir ?
  1. Je ne lis rien et je me concentre sur les notes prises en cours
  2. Je lis ou je survole si ça m'intéresse vraiment, (donc rarement...)
  3. Je lis un bouquin ou plus si j'ai le temps, au mieux en faisant une fiche de lecture
  4. Je lis tout et prends le temps pour
Après sept ans passés dans le circuit, il me semble évident qu'il ne faille pas TOUT lire. Pourquoi ? 
D'une part car ce serait trop de temps pris sur votre temps personnel : vous n'êtes qu'étudiant ! L'étudiant étudie certes, mais vous n'êtes pas réduits à votre statut et vous avez tout autant intérêt à économiser une bonne partie de votre temps hors-cours pour participer à des activités sportives / ludiques / artistiques ou au pire ne rien faire ! (à ne pas prendre au pied de la lettre non plus ;-)) C'est ce que j'expliquerai à l'avenir, les études de psycho peuvent avoir tendance à vous écraser...
D'autre part, la lecture d'ouvrages prendra tout son sens et son intérêt seulement lors de vos premiers stages ou travaux de recherche. Par exemple : vous retrouverez le mot bibliographie en Master quand vous devrez réaliser un mémoire de recherche (TER). A la fin de votre travail, vous insérerez obligatoirement toutes les références auxquelles vos écrits se rattachent. Cela implique à ce moment que vous ayez lu ces bouquins, plus ou moins rapidement, mais dans une optique de recherche précise sur un thème précis que vous avez choisi personnellement, en cohérence avec votre spécialisation professionnelle actuelle. En somme, le temps pris pour lire tous ces livres était investit de manière éclairée et orientée : je lis celui-ci car j'en ressens le besoin, et car il va me permettre ceci exactement.
Dans ce cas du travail de recherche, lire un maximum d'ouvrages est alors obligatoire et on comprend l'histoire d'amour entre les enseignants-chercheurs et le mot bibliographie ; dans le cas de cours dispensés à la Fac, notamment en licence où l'étudiant tâtonne plus ou moins en ce qui concerne son avenir pro, il me semble que le livre est pour le moment un support de découverte, de prise de recul et d'appropriation du point de vue de l'auteur. Appelons un chat un chat, lire de la psycho est quelque chose de désagréable tant la syntaxe et le vocabulaire sont opaques et scientifiques. Ne soyez pas forcés. Il serait bête de se dégoûter de la discipline de cette manière !

Je souhaiterai terminer ce message en abordant l'intérêt du livre, plus tard, quand l'étudiant sera mis en contact avec la population de son choix, notamment en période de stage (selon les Facultés : souvent à partir de la quatrième année, rarement avant). Tout comme le professionnel, le psychologue stagiaire est souvent mis en difficulté par rapport à ses expériences de terrain. Il peut se trouver en face de situations étranges, inexplicables, qui le mettent en défaut. Le psychologue DOIT ne pas rester dans cette posture et, pour ce faire, il lui faut trouver hors de lui d'autres pistes de réflexion : le collègue professionnel et compétent, l'article ou l'ouvrage scientifiques en lien avec la problématique, etc. Cela constitue le premier pas de l'aller-retour théorico-clinique auquel j'ai accordé tout un chapitre.

Ouverture

Je ne sais pas encore exactement ce que sera le contenu de ce blog (bloc en français). Ce qui me motive en ce moment réside dans l'idée d'aider les futurs et actuels étudiants qui se lancent dans des études de psychologie à faire leur chemin d'une manière plus éclairée et moins tortueuse qu'il en a été pour moi. Les études de psychologie sont difficiles, et encore plus pour certains. Les soutiens sont rares, encore moins pour l'étudiant psy en début de parcours.
Bien sûr je n'ai ni l'expérience ni le savoir suffisants pour faire des cours ou apporter des recettes miracle, mais ce site pourra sans doute sortir quelques uns du brouillard dans lequel la fac peut parfois nous plonger insidieusement.